« Ah, si on avait le temps... »
— une
enquête de Noëlle Clou pour Gael —
[Publiée en mars 2004 p.170]
- Si j’avais plus de
temps, je demanderais le divorce en bonne et due forme... mais voilà, rien que
l’idée de devoir affronter les administrations allemande et belge me donne la
migraine. Et puis nous sommes séparés depuis tellement longtemps... [Marianne,
52 ans, journaliste]
- Avec plus de temps,
je ferais des économies. Je préparerais des recettes « maison »
par exemple (confitures, marinades, etc.) que je congèlerais : on
mangerait mieux, plus sainement et pour moins cher. Mais voilà, allez expliquer
ça à mon patron ! [Agnès, 36 ans, employée].
- Je ne veux pas
avoir plus de temps car ça ne changerait rien ! Je me connais, si vous me
donniez deux heures de plus par semaine, je me mettrais une activité
supplémentaire sur le dos (aquarelle, peinture ou sculpture) – et ma vie serait
toujours aussi bousculée ! C’est comme si vous me donniez plus
d’argent : je le dépenserais aussi vite et serais toujours aussi endetté,
voire plus ! [Lucien, 40 ans, décorateur]
- Avec plus de temps
je reviendrais sur ce que j’ai fait et je corrigerais. Mon métier est de
traduire, mettre en forme et rédiger des modes d’emplois de logiciels. Mais il
faut toujours faire vite – et la qualité, parfois, s’en ressent. Si je pouvais
peaufiner, je me sentirais mieux ! [Simone, 29 ans, rédactrice]
- Je n’ai pas besoin
de plus de temps – je suis veuf et retraité. Les journées sont interminables,
si elles ne faisaient que 10 heures je ne m’en porterais pas plus mal ! Je
ne suis pas pour la réduction du temps de travail mais pour la réduction du
temps de l’ennui ! [André, 74 ans, retraité]
- Si j’avais plus de
temps je travaillerais plus ! J’ai tellement besoin de sous pour mes
petits monstres ! [Joël, 32 ans, père de famille nombreuse]
- Moi, c’est la
généalogie qui m’intéresse. J’ai le projet de retrouver le plus d’ancêtres
possible de notre famille et de consacrer une fiche détaillée à chacun. Mais
c’est un travail de romain : plus on remonte dans le passé, plus les
fiches se multiplient ! Mes week-ends sont trop courts et les voyages de
vérification en province de plus en plus longs. Des témoins essentiels
disparaissent aussi, atteints par l’âge – victimes de ce temps que j’essaie
d’apprivoiser : c’est une course sans fin... [Pierre-Yves, 54 ans, médecin]
- Je rêve de bleus
de mer, ce sont des oiseaux que j’ai envie d’élever – mais je n’ai ni la
place, ni le temps ! On en reparlera quand j’aurai mon diplôme de
vétérinaire ! [Alessia, 20 ans, étudiante]
- Je ne m’occupe pas
assez de mes enfants, je culpabilise à mort par rapport à ma sœur qui est mère
au foyer et qui m’explique que ses petits chéris sont épanouis, gentils,
brillants, etc. Les miens sont ingérables, mon mari et moi sommes tout le temps
sous pression... Arrêtez le monde, je veux descendre ! [Mathilda, 40 ans, acheteuse]
- Avec plus de temps je créerais de nouveau.
Mais comme il faut bien vivre, je donne des cours dans trois académies
différentes – sans compter les cours particuliers. Je n’ai plus le temps pour
moi, donc pour mes projets personnels, c’est frustrant ! [Jean-Alexandre,
42 ans, professeur de piano]
- Moi je démarrerais
bien un programme « J’adopte une rue », comme au Canada ! Ça
consiste à prendre en charge à plusieurs une rue de la ville et à la nettoyer, l’entretenir,
la rendre sûre etc. Mais bon, où trouver le temps de faire du porte-à-porte, de
réunir les voisins, de distribuer les tâches, etc. [Diana, 34 ans, dessinatrice]
- Avec plus de temps
je m’occuperais mieux des patients. Au lieu de poser des dizaines d’actes
médicaux, je parlerais, j’expliquerais, je me soucierais de la vie des gens, je
serais plus à leur écoute. Le manque de temps me transforme presque en robot,
lequel passe de chambre en chambre en pilotage automatique. C’est dommage... [Ursula,
49 ans, neurologue]
- Si l’on me donnait
plus de temps je serais bien embarrassé ! Ma femme et moi planifions tout
quatorze mois à l’avance ! L’école des enfants, les vacances, les ponts,
nos métiers respectifs, les sorties, les week-ends – tout est inscrit sur un
planning mural multicolore : le jaune pour les congés, le bleu pour le
travail, le vert pour la famille etc. Il n’y a pas vraiment de place pour
l’imprévu, ça nous rassure ! [Jean, 35 ans, horloger]
- Donnez-moi une
heure tous les matins et je dormirai une heure de plus ! [Sophie,
14 ans, lycéenne]
- Si j’avais plus de
temps, je ferais de la politique – je m’engagerais activement pour changer
la vie (comme on disait au siècle passé) ! [Karl, 28 ans, économiste]
- Avec un mois de
plus par an – et un peu d’argent quand même ! – je voyagerais. Chaque
année quand arrive l’hiver, j’ai des envies pas possibles de Sri Lanka, de Mer
Rouge ou d’Amérique centrale. Surfer sur Internet et dans les catalogues ne me
suffit pas... [Louella, 30 ans, représentante]
- J’apprendrais les foreign languages,
comme l’italiano, ou die deutsche Sprache !
[Denis, 33 ans, coiffeur]
- Si j’avais plus de
temps j’irais voir mes enfants plus souvent : on dirait qu’ils se sont efforcés
de mettre le plus de kilomètres possibles entre leur mère et eux ! Milan
pour l’un et Oslo pour l’autre : moi j’habite Liège ! [Solange,
52 ans, psychothérapeute]
- Mon rêve ?
Pouvoir m’occuper du jardin à plein temps! J’ai la main verte mais des horaires
impossibles : toujours en déplacement pour des visites, des repérages, des
interviews... [Sandra, 39 ans, voyagiste]
- Je fais du sport
trois heures par semaine – mais ce n’est pas assez d’après mon médecin. Surtout
que mon médecin c’est mon mari ! [Lou-Andrea, 28 ans, comédienne]
- Si j’avais plus de
temps, je préparerais mieux mes élèves – mais j’ai un programme d’enfer à
suivre, et tant pis pour ceux qui décrochent. Ce n’est pas juste... [Nicolas,
27 ans, professeur]
- Ah ! partir aux champignons tous les jours de l’année ! Les
suivre de pays en pays selon les saisons ! [José, 40 ans, mycologue
amateur]
- Si j’avais plus de
temps pour faire les choses je serais moins stressée, donc je prendrais moins
de médicaments, donc ça me coûterait moins cher, donc le temps c’est bien de
l’argent... d’économisé ! [Paola, 60 ans, diplomate]
- Je repousse depuis
toujours un bête examen de routine : la prostate ! Pourtant je
devrais surveiller... L’excuse que je me donne c’est que je n’ai pas le temps...
Et c’est pareil pour le glaucome, les arythmies cardiaques, le parodonte, les
aigreurs d’estomac, la nycturie... [Éric, 52 ans, procrastinateur
hypocondriaque]
- J’ai une horrible
frustration au niveau de la fête ! Je ne sors que trois soirs par semaine
alors que mes potes s’éclatent tous les jours ! Mais voilà, je viens
d’être engagé comme agent de surface : pas question de louper mon réveil
le matin... [Alex, 24 ans, teufeur]
- Je ne commence plus
aucun « grand chantier » comme je les appelle. Je n’ai pas le temps
de les terminer dans des délais raisonnable et ma femme m’engueule. Alors je
laisse fuir les gouttières, je ne repeins plus les murets du jardin et j’achète
des meubles tout faits... Quand on frise l’inondation je téléphone à un S.O.S.
quelconque qui fait tout de travers mais vite... Le bricolage me manque... [Albert,
44 ans, machiniste]
- Pour observer le
ciel il faut de l’obscurité, un air sec, stable et transparent. Toutes choses
qui se trouvent loin de la ville, dans des trous perdus et au-delà de minuit.
Ça prend un temps fou, l’astronomie... Si j’avais plus de temps je serais une
astronome célèbre ! [Sylvie, 26 ans, photographe]
- Si j’avais le temps
j’irais au cinéma tous les soirs avec Josette. Pas pour le film, mais pour
s’embrasser au dernier rang. Mais voilà, je n’ai pas le temps... et Josette est
partie. [Johnny, 15 ans, DJ]
- Quand j’aurai le
temps j’irai à la commune proposer mes services pour tenir une permanence
téléphonique de nuit. Je suis insomniaque, bientôt retraité : j’ai envie
d’aider les gens comme moi qui ont peur toute leur vie des fantômes – réels ou
imaginaires : il y en a plus qu’on ne croit. [Serge, 58 ans, chauffeur
de taxi]
- Moi, si j’avait du temp, je retournerez sur
les bans de l’écolle. [Didier, 24 ans, footballiste]
- Les échecs,
aujourd’hui, se pratiquent à des cadences de plus en plus rapides – les
spectateurs et la télé préfèrent ça. Mais les deux camps multiplient les
erreurs. Si on pouvait retrouver la durée d’antan, ce serait mieux ! [Johan,
28 ans, ex-champion]
- Le reportage c’est
l’urgence. Le documentaire c’est le recul. J’aimerais faire plus de
documentaires. [David, 30 ans, réalisateur]
- Moi, si j’avais
plus de temps, je n’irais sûrement pas dans les musées, ni aux expos, ni dans
les salles de vente : je regarderais encore plus la télé. [Viviane,
38 ans, gardien de musée]
- Il faudrait que je
mette à jour mes connaissances et mes outils : je n’ai plus ouvert une
revue professionnelle depuis l’université, ni suivi de cours. Mais quand ?
[Roxane, 55 ans, pédiatre]
- Soit je travaille,
soit je dors. Je ne trouve pas le temps de méditer. Si je m’organisais mieux
peut-être que je trouverais le temps de réfléchir et de me recueillir.
Contempler le monde, c’est ce qui me manque le plus. [Carole, 38 ans, musicienne]
- Avec plus de temps
j’échelonnerais mes remboursements, je paierais moins par mois, je soufflerais
un peu ! [Noël, 28 ans, emprunteur impénitent]
- Si j’avais plus de
temps, je vivrais plus longtemps ! [Cécile, 8 ans, enfant
précoce]
- Moi je referais ce
que j’ai déjà fait – mais en mieux ! [Léa, 50 ans, architecte]
- Si les week-ends
faisaient trois jours j’en consacrerais un à étudier, me former, assister à des
conférences, etc. [Janine, 40 ans, ouvrière]
- Si j’avais du
temps, je ne bâclerais pas mes enquêtes ! [Noëlle Clou, 42 ans, copyright
free-lance]
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