11/02/2007

 

[Alain H.] :

 > C’était un très grand moment d’émotion - qu’Éric racontera très bien  

 

[É.] :

... pour l’émotion, Éric est pathétique, autocontrôle et cœur de pierre, souvent -- mais là, reconnaissons-le, chapeau bas au trio Éliane, Marie et Alain qui fit fort (de France). Retour sur image.

 

 

14:22, samedi, je range ma tire en triple vitesse à la gare car le train de Jean Tillie ouvre déjà ses portes, dégorgeant mille passagers ultraluminiques montés sur ressorts à Paris. Alain et C Marie sont dans la province du Luxembourg, pestant contre les plaques jaunes et noires qui zigzaguent dans les courants d’air. Pas de conducteur fantôme en face mais de drôles de pistolets quand même !

 

Éliane finit de choisir le plateau de fromage chez l’affineur d’en presque face, tandis que sa fille Hélène hésite, dans l’appartement vide, entre la mini sur bas de laine vingt deniers ou le short/bottillons qui tue.

Martine et Jean-Luc corrigent déjà du bout des yeux tout ce qui leur tombe sous les yeux, Forges de Clabecq, Petit Roeulx, Ittre -- toponymes napoléoniens figés par l’administration corse, tel Bois-le-Sec devenu Drogenbos, frontière linguistique obligeant.

Jean, justement, traîne une valisette de métal munies de roulettes bienvenues, la doc qu’il emmène pèse des tonnes et recèle mille Arts et Métiers dont celui d’imprimeur -- avec la page en accordéon que la profession consacre aux signes de corrections -- admirez, du haut de ces pattes de mouche deux siècles vous regardent (au moins) !

 

 

 

À 19:47 les premiers bouchons de champagne sortent des muselets. On toaste à l’Opus Double Majuscule -- sidérant de beauté réelle après tous les pdf pixellisés. Alain a porté ce travail, comme Atlas le monde, et le kilo soixante-huit grammes qui couine devant nous, emmi les cristaux de famille des Goutenoire, tire larmes de joie et petits cris de souris à toute la smala groggy, les doigts pleins de rubans.

 

Éliane rit, Hélène est en short, le signataire boit comme un Rital en manque de liqueur depuis lurette, les yeux s’allument comme des briquets Bic aux concerts suisses de Johnny, la cuisine lâche des bouffées de senteurs édéniques -- si ce n’est pas le paradis vrai, Winston Churchill s’en approche à quelques fifrelins.

 

 

On feuillette, on manipule, on rabat, traque en vain la Source de la Coquille chère à Laucou-Soulignac, les souvenirs remontent et celui qui sourit, un étage au-dessus, au sixième venteux, c’est Jean-Pierre, bien sûr, pas fâché du piège qu’il a tendu à ses disciples, fier du labyrinthe laissé en friche, admiratif des écheveaux dénoués désormais. L’art de vivre en société typographique est achevé pour toujours -- jusqu’à la fin des temps lisibles, du papier en papier, de l’encre qui tache et des lecteurs joyeux. 

 

On passe à table, on prie en scout, la messe est dite, les convives se meurent d’amour pour une salade aux textures de paradis -- alors que nous nargue bientôt un jambon si bon qu’on voudrait élever des porcs, là, tout de suite, dans le salon et les escaliers de l’immeuble...

Des bintjes du Chili rissolent aux oignons -- il y a même des bulbes qui circulent, des encyclopédies qui traversent la table, des noms étranges qui volent, des logiciels qui ne trient plus rien, des sites Internet en rade, des CD-Rom valant bonbon, des anglicismes pourchassés -- pendant que le signataire récidiviste avale les huit scaroles, la Dame de Pique, dix petits witloofs, les endives habitent au 21 et passez-moi donc l’eau qu’on réserve aux Bobs des bouts de table...

 

 

On s’est séparé vers pas d’heure, whisky, champagne, prune cirée, blanc, rouge -- il manquait la neige et le verglas pour faire tourner encore les têtes vissées aux firmaments ucclois. Merci à toi, Eliane, pour cette soirée magnifique, merci à Alain, Marie et toutes les hurtiguettes, merci à Jean Fontaine, André, Thierry, Armelle, Laurence, Laurent, Vincent, François, Paul et (tous) les autres, on va pouvoir désormais clouer le bec à la planète entière, c’est écrit là, page 212 ou 47 ?), dans le tome I ou le volume II ? – ch’sais pu’, mais si t’as pas le brol, Carole, on te signale, robe de bure ou pas, que la souscription est ouverte, envoie les biftons, on livre fissa -- même au-delà des mers démâtées, des océans de virgules, des Alpes demi-fines et des lacs siglés!

à+

É.

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[ci-dessus, 2e édition mise à jour en novembre 2010]