[Bestiaire
ébloui des lexies tératoïdes]
Chapitre
13
Cinquante-deux
records
__________
Voici
deux tableaux commentés de mots records. Ainsi, quand
votre petit neveu viendra vous demander quel est le mot qui contient le plus de
k, songerez-vous au Tintin de la première Île Noire, celle
où ce dernier portait des pantalons de golf – knickerbockers – bien plus
seyants que les jeans ; il paraît plus improbable en effet de le
passionner (votre neveu) avec l’histoire du kjökkenmödding,
étrange ovni danois tombé dans le Robert en 9 volumes et sommairement
défini comme « amas de débris ménagers protohistoriques »...
Mots présentant une lettre donnée
en quantité record :
[A.5] = abracadabrant,
tarmacadamisa (tarmacadamiser : mettre de l’asphalte).
[B.3] = absorbable, baobab,
bobby (policier à Londres).
[C.4] = accroche-cœur (mèche de cheveux), cache-cache, échinococcose (maladie provoquée par une sorte de ténia).
[D.3] = addendum,
débandade, rhododendron.
[E.7] =
recherche-développement.
[F.4] = fifty-fifty (voilier mixte).
[G.3] = gigogne, groggy,
rouge-gorge, jogging.
[H.3] = chihuahua, haschich.
[I.6] = indivisibilité,
inintelligibilité.
[J.2] = jiu-jitsu, jojo,
joujou, jujube.
[K.3] = knickerbockers, kjökkenmödding.
[L.5] = lamellé-collé.
[M.4]
= commémorâmes, miam-miam, mammectomie (ablation d’un sein).
[N.6] =
non-interventionniste.
[O.6] = odontostomatologie.
[P.3] = approprié,
coupe-papier, pupipare (se dit d’un insecte dont les larves
naissent à l’état de nymphes), hippopotame.
[Q.2] = quelque, quoique.
[R.5] = arrière-grand-mère,
arrière-grand-parent, yorkshire-terrier.
[S.7] = assassinasses,
ressassasses.
[T.5] = trottinette, tutti
frutti.
[U.4] = numerus-clausus,
tumultueux, cuniculiculture (de lapins),
turlututu, usufructuaire.
[V.3] = ovovivipare,
servovalve, savoir-vivre.
[W.3] = bow-window, pow-wow.
[X.2] = anxieux, luxueux,
uxorilocaux (se dit d’une résidence où les époux
habitent près des parents de la femme).
[Y.3] = hydroxybutyrique, polyoxyméthylène, polyéthylèneglycol,
phényléthylmalonylurée.
[Z.3] = razziez, zigzaguez,
zonzonnez, zozotez, zwanzez.
« On est au Motel Yoyo. Télé
couleur et tout ! Terrible ! Baisers à tous. »
(Perec,
L’infra-ordinaire)
Dans la seconde liste nous avons
joué au jeu de la voyelle et de la consonne unique – les oulipiens disent monovocalisme et monoconsonnantisme :
un texte monovocalique en a, par exemple,
n’utilise pas d’autre voyelle que le a, toutes les consonnes étant
bienvenues (le cha-cha-cha est une danse monovocalique,
comme la samba, le cancan, la java, le ska, le czardas,
la zambra, le kathak,
le jerk, le swing, le twist, le boston, le fox-trot,
le pogo, le rock, le zorongo et le smurf – mais pas la danse dyonisiaque, plombée par ses six voyelles).
Un mot record dans la liste est un
mot qui comporte la lettre élue un maximum de fois. Si deux mots arrivent à
égalité, on préfèrera celui qui agglutine le plus de lettres complémentaires.
Ainsi préfèrera-t-on réensemencements à dégénérescences, lesquels
comportent six e chacun mais qui sont saturés par, respectivement, dix
et neuf consonnes.
[A.5 + 9] = abracadabrants.
[B.3 + 3] = baobab.
[C.4 + 6] = couci-couça.
[D.2 + 4] = doudou, dédiée,
dédiai.
[E.6 + 10] =
réensemencements.
[F.3 + 4] = fieffée,
fieffai (fieffer : donner un fief à quelqu’un).
[G.2 + 5] = aiguage (droit d’amener de l’eau sur son terrain),
gougeai (gouger :
faire une cannelure à l’aide d’un ciseau à bois).
[H.2 + 4] = houhou (interjection).
[I.4 + 6] = infinitifs,
inhibitifs.
[J.2 + 4] = joujou.
[K.2 + 3] = kayak.
[L.4 + 5] = allolalie (trouble de la parole).
[M.4 + 4] = miam-miam.
[N.4 + 3] = nonnain (nonne et pigeon de petite taille).
[O.5 + 9] = photocomposons.
[P.2 + 6] = pioupiou (fantassin).
[Q.2 + 5] = quoique.
[R.4 + 6] = arriérerai.
[S.6 + 6] = saisisseuses (encodeuses).
[T.4 + 5] = tête-à-tête.
[U.4 + 5] = turlututu.
[V.2 + 6] = vouvoyai,
vouvoyée.
[W.1 + 5] = wouaou (interjection exprimant
l’enthousiasme).
[X.2 + 4] = axiaux
[Y.1 + 6] = flyschs (minerais composés de grès et de
schistes).
[Z.3 + 5] = zézayiez.
Il
y a peut-être moyen de battre l’un ou l’autre de ces records : nous vous
encourageons à le faire et à nous communiquer vos résultats. M. Van
Ellerbach, par exemple, nous a suggéré d’aller voir du côté de la
classification périodique des éléments et des recommandations de l’UICPA
(Union internationale de chimie pure et appliquée). Selon cette dernière, les éléments 104 et
supérieurs doivent porter le nom de leur numéro, dans le respect du code
suivant : épeler le nombre atomique selon le code qui suit et ajouter le
suffixe -ium :
O
= nil
1
= un
2
= bi
3
= tri
4
= quad
5
= pent
6
= hex
7
= sept
8
= oct
9
= enn
On
notera que les dix mots du code ont des initiales différentes. Ainsi
pourra-t-on désormais baptiser, écrire, lire et symboliser tous les éléments
non encore découverts. Le 104 par exemple s’appelle unnilquadium
et se note Unq, le 105 unnilpentium
(Unp) et le 106 unnilhexium
(Unh). Le unununium (élément
111) comportera donc quatre u,
soit autant que les tumultueux, cuniculiculture, usufructuaire
et turlututu du tableau ci-dessus ; de même l’hypothétique élément
666 portera-t-il le nom (satanique ?) de hexhexhexium,
affichant trois x...
__________
Solutions
du chapitre précédent
et motifs record impurs :
-
en 4 lettres : abstrayions et obstruaient
-
en 5 lettres (parmi d’autres) :
brayaient, clouaient, croyaient...
-
en 6 lettres : youyous.
Pour
attaquer le chapitre suivant, aller voir ici.
Pour
somnoler à l’accueil, c’est là.
Pour
un repos éternel, là.